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La Mère Mékong

Les nouvelles aventures de Patricia, hic et nunc

Peines de cœur

Publié le 10 Février 2023 par Patricia in santé

Peines de cœur

Ou Chroniques passagères d'une femme patiente sous haute surveillance, à l’hôpital.

Être un corps, être un cœur, être une pathologie, une malade, ou être un être, une toujours vivante ? Considérée dans sa globalité, son entièreté, son intégralité ?

Mon cœur palpite, bat la chamade. Suis-je pour autant diminuée ? Toute petite ? Réduite à un cœur en hiver, à un organe, un cœur meurtri ?

Nous, les patients, pas patients, ne sommes pas des femmes, ni des hommes, nous sommes des dossiers, des lits, des réservations, pas des personnes avec une particularité ponctuelle. Parfois je ressens ça.

L’hôpital, c’est le soin, ce devrait être synonyme de bienveillance, d’empathie. C’est avoir le cœur sur la main. Normalement.

On ne nous dit pas tout ! Moi oui !

Mon cœur bat la chamade, j’ai des palpitations arythmiques. Je tombe dans les pommes.

Alors, l'humour fait suite à la colère, pour dépasser les petits bobos de la vie, pour dire qu'on est toujours vivant et qu'on avance. On a conscience qu'il se passe quelque chose de sérieux, de grave peut-être ; mais rire ou sourire, râler même, puis écrire m'aide à prendre du recul et à accepter les déraisons de mon cœur qui n'a pas de raison et qu’il ignore.

L'hôpital souffre de troubles de la communication (entre autres) ! Personne n'est capable de me faire lire mon dossier, ne peut retrouver les comptes-rendus d'examens donnés au docteur, ne sait quand je vais passer l'examen y ou rayon x, ou m’annoncer la suite des festivités. Ou bien, on me répond n'importe quoi pour que je laisse tranquille ! J’en ai gros sur le cœur ! Ou parce qu'on ne sait pas. Qui ça ON ? Le con ! « Je vais voir, je vais me renseigner ». Et on ne revient pas souvent avec l’information.

Communiquer ? Entrer sans frapper dans la chambre ; entrer et ne pas se présenter. Me prendre de haut sans même s’asseoir. Hauts de cœur ! Me parler comme si je n'étais pas capable de comprendre, que j 'étais diminuée, ou juste réduite à un symptôme. A chaque demande de ma part, il faut demander l’accord à un médecin responsable, et du coup, ça reporte au lendemain si c'est pour un changement de traitement ou pour une info médicale. Il faut que je m’arme de patience ! Ça me fend le cœur !

Me redemander chaque fois le nom de mon médecin traitant, de mon cardiologue, …

Rencontrer tous les jours des internes différents qui ne savent rien de ce que j’ai dit la veille et qui me redemandent encore ce que j’ai dit précédemment ; et à qui je redemande encore des vitamines, ou une autre information, ou encore de voir le médecin. Et l'attendre des heures. Je ne suis pas sa dame de cœur !!

Est-ce qu'on utilise le terme « Infarctus » ?

Je n'en ai pas eu ! Mais on essaie de me faire peur en me disant que je peux faire une syncope à n'importe quel moment et rester sur le carreau (de la cuisine).

Peines de cœur

Comment passer un week-end, pénarde, aux frais de la princesse déshéritée? Voici quelques anecdotes qui m’ont donné des hauts de cœur, des réflexions qui m’ont été droit au cœur :

Moi : Dring ! C'est pour le bassin ! Aide-soignante : c'est pour faire quoi avec le bassin ? moi : C'est pour le vider ! (a.s. :)Vous ne pouviez pas attendre ?

C'est comme ça qu'une fois, je me suis débrouillée avec mes « rallonges cardiaques » (reliées au monitoring) pour aller jusqu'à la chaise percée, et qu'elle était effectivement percée, avec le bassin mal placé ; par conséquent, j'ai fait pipi par terre ! Malaise.

Chaise percée, que j'ai dû aménager moi-même une autre fois, avec un sac poubelle, pour faire la grosse commission, comme dirait l'autre, car personne n'est venu quand j'ai sonné. Et moi, quand j'ai envie, je ne peux pas me retenir ! Plus tard, quand l'aide-soignante est venue récupérer le paquet, elle m'a demandé pourquoi je n'avais pas appelé.

Un autre infirmier de nuit : « Si je vous donne ce médicament, c'est pas pour le laisser traîner sur la table ! C'est pour le prendre ! » Suis-je déjà redevenue une enfant ?

Ça, c’est l’hôpital !

Se laver à la bassine et faire ses besoins, couchée sur un bassin. Dormir en nuisette « assistance publique » en papier non tissé et sans manche ; il y a plusieurs modèles, en vogue, qui s 'ouvrent dans le dos et me laissent découverte la plupart du temps. Et laisser tomber les cordons, pour la nouer à l’arrière, dans le bassin plein de...

Avoir l'interrupteur à trois mètres du lit et devoir sonner l’infirmière pour allumer ou éteindre.

Déguster la cuisine équilibrée (?) très réputée de l’hôpital : œuf dur, chipo, lentilles, fromage, et compote, parfois sans sel ; ou encore : œufs durs et omelette. Des coquillettes au jambon dans un menu sans gluten.

Peines de cœur

Dormir dans le bruit et l'agitation du personnel dans le couloir et se faire réveiller pour prendre la tension quand je viens juste de m'endormir.

Avoir l'impression de déranger quand j’appelle pour demander quelque chose, redemander qu'on ferme la porte pour avoir un semblant d'intimité, qu'on accroche un rideau occultant,…

Perdre ses affaires qui ne suivent pas toutes seules d'un hôpital à un autre (le Samu ne s'embête pas à les prendre). Et les récupérer grâce à Maman !

Devoir attendre la fin du week-end pour avoir un livreur comme promis qui m'apportera les habits laissés au premier hôpital.

Qu’on me demande si je me lave toute seule chez moi. Et ne pas dire clairement les choses explicites.

Faire l'inventaire de mon sac sans discrétion et en public.

Attendre qu'on me change de chambre et attendre longtemps jusqu'à être au bord du pétage de plomb. Cœur gros.

Attendre une intervention à jeun depuis la veille et ne passer au bloc qu'à 18 heures.

Rencontrer une grosse brute au bloc qui m'arrache un patch sans délicatesse et en me laissant un gros bleu.

Rencontrer un brancardier branque qui s'amuse à faire des blagues lourdingues et salaces à ses collègues et qui en est fier.

Se faire réveiller à 7h30 par une perceuse en cardiologie, c'est un pincement au cœur .

Vouloir voir une vraie personne ! Maintenant, il y a un interphone dans la chambre et on me demande ce que je veux avant de se déplacer. Comme si je ne sonnais pour rien, juste pour voir les beaux yeux de l'infirmier !

Peines de cœur

Des petits plus de mon séjour (quand même) :

un aide-soignant complice et sympathique qui m'a fait rajouter un croissant et qui m'a cherché une chemise de nuit de princesse ( tout est relatif, cad en coton) sans en trouver une seule. Un cœur en or !

Une infirmière de nuit qui me laisse dormir et me prend les constantes juste avant que je dorme, et avant qu'elle ne reparte le matin.

Manger un repas bon, quelques fois.

Quelques personnes bienveillantes et souriantes. Parfois, ce sont les femmes de ménage qui ont un mot gentil et qui me remonte le moral.

Au bloc, tout le monde était si charmant que j’y serais bien restée. (Non, il y faisait trop froid). Ça m’allait droit au cœur (chaud au cœur) !

Encore un plus ? Je suis contente d'être française en France, dans un hôpital de pointe, avec assez de personnel pour s'occuper de moi. Et j’ai même gagné un gilet de sauvetage qui me permet de rester connectée et le droit de revenir dans un mois ! Heureusement que mes aventures asiatiques ne m’ont pas conduite vers les urgences locales !

Je sors finalement (libérée, délivrée) après une douzaine de jours et quelques explorations, avec de la joie au cœur.

Merci pour votre soutien, de tout mon cœur ou Cordialement,

Patricia

 

Peines de cœur
Peines de cœur
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S
Vraiment...ce voyage au sein (ou plutôt au coeur)de l'APHP fait bien moins rêver que ton escapade en Asie!!! Bon rétablissement avant ton prochain voyage!!! et à très bientôt quartier Belleville .<br /> Bise
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F
Qu'est devenue l'empathie et la notion de prendre soin des soignants et la bientraitance???<br /> En faisant partie je sais pourquoi je ne retravaillerai plus à l'hôpital et pourquoi je l'ai quitté.
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P
Je sais qu'il faut aussi bientraiter nos infirmiers et infirmières ! Mais quand tu es dans un lit, c'est dur !
T
Bon à part tout ça, comment ça va ?!
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P
Je vais bien, je ne me sens pas malade, je suis juste un peu inquiète par le port de cette machine qui surveille les battements de mon cœur. Mais cette semaine, calme plat ! Ca ne veut pas dire cardiogramme plat ! Je me repose un peu ! Ahhh
C
C'est passionnant, émouvant, énervant, décevant, rageant et cruellement juste.<br /> C'est caractéristique de ton écriture, pessimiste, optimiste et réaliste. <br /> C'est objectif et subjectif, impulsif, vindicatif, à vif.<br /> Tu fais bien de le dire, de l'écrire sans jamais tarir.<br /> On te souhaite un bon rétablissement. <br /> Bises de nous deux
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P
Merci. J'ai essayé de mettre de l'eau dans mon vin, quoique je n'ai pas encore recommencé la bibine !